Destiné aux personnes en situation d’exploitation sexuelle âgées de 12 à 24 ans, le programme SPHÈRES s’accorde au féminin, car 95 % de sa clientèle est composée d’adolescentes ou de jeunes femmes. Il vise à mettre fin à l’exploitation sexuelle en soutenant leur pouvoir d’agir et leur volonté de changement à partir d’une approche fondée sur l’humanisme et la concertation entre intervenantes.

Ceci passe par un accompagnement personnalisé et sécurisant, un accès à des ressources adaptées, mais aussi par une offre d’activités et d’expériences positives pour leur permettre de trouver leur place dans la société. Le cycle de l’exploitation sexuelle est complexe, en sortir n’est pas chose facile. La littérature démontre que les femmes feront de nombreux allers-retours avant de choisir d’abandonner le milieu d’exploitation, car l’échange de services sexuels contre rétribution répond à des besoins qu’une personne n’arrive pas à combler autrement. Elle s’apparente, à certains égards, à une forme de dépendance.

Réduction des impacts négatifs

Charline Côté et Nathalie Gélinas, de l’Institut universitaire Jeunes en difficulté (IUJD), insistent sur le
caractère 100 % volontaire de la participation des personnes qui adhèrent à SPHÈRES. « Ces femmes sont victimes de violence, et nous devons les protéger, mais elles sont avant tout des personnes qui font des choix, quel que soit leur âge », précise Charline Côté. Cette nuance est importante, car ces adolescentes
et jeunes femmes ne se perçoivent pas nécessairement comme des victimes.

La personne qui adhère à SPHÈRES est au centre du programme. Les interventions reposent sur
le postulat que la personne aidée a le potentiel d’apporter des changements à sa vie. La personne intervenante l’accompagne pour identifier ses besoins et ses objectifs tout en cherchant à réduire les risques associés à ses choix.

Par exemple, l’équipe tentera de limiter les conséquences négatives d’un retour vers l’échange de services sexuels pour une adolescente. Elle veillera à l’outiller pour qu’elle se protège et que les risques pour sa santé physique et psychologique soient restreints. SPHÈRES n’impose pas l’abstinence, qui entraîne souvent une réaction d’opposition des personnes, mais les guide plutôt vers des changements durables et nourrit leur désir d’autonomie.

La richesse d’une démarche concertée et intégrée

Avant la création de SPHÈRES, les services destinés aux jeunes en situation d’exploitation sexuelle existaient, mais ne répondaient pas à tous les besoins de ces jeunes femmes aux profils complexes, souvent en rupture avec les services traditionnels. Ainsi, les ressources existantes faisaient face à de nombreux défis.

C’est dans ce contexte que le programme est né de la collaboration des CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-
de-Montréal et de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal, du programme des Survivantes du Service de police de la ville de Montréal, de la Fondation Marie-Vincent ainsi que des organismes L’Anonyme et En Marge 12-17.

Nathalie Gélinas rappelle que le modèle de SPHÈRES repose sur une action concertée et intégrée. Cela signifie que les membres de l’équipe, détenant des expertises multiples, mènent des actions en collaboration avec les autres en y intégrant leur vision, afin de mieux répondre aux besoins des participantes.

La Commission spéciale sur l’exploitation sexuelle des mineurs, tenue au Québec en 2020, a reconnu l’urgence d’agir et donné une impulsion au programme qui a accompagné plus de 140 personnes depuis sa création en 2017. Véritable pratique de pointe, il est en cours d’implantation dans différentes régions du Québec, à partir de son cadre de référence étoffé et de ses multiples outils de formation. Bientôt, d’autres adolescentes et jeunes femmes seront soutenues dans leur désir de changement grâce au déploiement de SPHÈRES.

LES DÉTAILS…

Charline Côté et Nathalie Gélinas, chargées de projet au Centre d’expertise de l’IUJD

Pour en savoir plus : Cadre d’intervention commun du programme SPHÈRES (2022) et Cadre de référence en matière d’exploitation sexuelle (2021) produits par l’IUJD.

Bulletin SPHÈRES

* Ce texte est écrit au féminin pour être en accord avec la thématique.